Rue Ronsard

Une travée aux pigments ternes et tristes,

Transpercée par des trous et des crevasses bétonnés.

Un sentier de guerre où gisent les corps désabusés de frêles ados sans espoirs.

Des jeunes meurtris et tourmentés,

Comme cette longue trainée de goudron qui traverse Talence,

Jusqu’au sinistre arrêt de Tram, Doyen Brus.

Une porte vers la Liberté.

Adossés à cette route infernale,

D’affreux bâtiments métalliques,

Vantent les funestes mérites

D’un monde d’argent, de sciences et de profit.

Derrière ces grilles, des silhouettes en costumes,

Luttent contre la Roue du Temps.

Etriqués dans leurs tenues, ces pantins cadavériques,

Courent pour rattraper la vie.

Quelquefois, ces ombres endimanchées toisent avec stupeur,

D’étranges piétons montés sur des machines.

Des adultes aux membres mutilés,

Que le monde a jadis abimés.

Avançant prudemment sur cette voie escarpée,

Les passants en fauteuil roulent pour fuir la morosité.

Une cigarette glissée entre les lèvres, ils tentent de s’évader.

Hélas le voyage reste de courte durée,

Et la réalité reprend ses droits,

Une fois le soir tombé.

Parfois lorsque je remonte cette rue,

Je me dis que c’est la peine qui hante ces pavés.

Des larmes de bitume qui coulent sur les trottoirs,

Et ruissèlent sur les graviers.

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