La stagiaire de la bibliothèque d’histoire (2) par Anouka Bertolucci

AVERTISSEMENT : Pour les besoins du suspense, j’ai parfois pu exagéré certains traits. Mes supérieurs n’étaient pas des tortionnaires.

Voici la suite de :

 La stagiaire de la bibliothèque ELIE VINET (retenez ce nom pour la suite) :  

 1. Retour de week-end. Doms : « Alors, t’as des questions ? Je te préviens, si ce soir à 17h tu m’en as toujours pas poser, je te laisse pas partir ».

Oh là là non c’est horrible… Je me casse la tête tout l’après-midi. Je cherche, je cherche. Quand soudain…  

(ellipse pour le suspense)

 17h sonne au réveil de Doms. Il place sa haute silhouette devant moi, croise les bras, écarte les jambes et parle.  « Alors. T’as une question ? ». J’avale ma salive. Je serre les poings. Je me lève. Je mesure 1m58. « Oui ». (Silence).  C’est qui Elie Vinet ? ».

 (Heureusement que la bibliothèque ne s’appelle pas Jeanne d’Arc. Je serais restée toute la nuit).

2. A la bibliothèque d’histoire la vie est rude. Les stagiaires couvrent chacune 97 livres par semaine. Parfois, elles font des bêtises. Elles collent les codes-barres à l’envers. Et Doms toujours aux aguets de déclarer : « Tu l’as pas collé droit le code-barres. – Ben si, comme ça il est droit ». La stagiaire vient de mettre le livre en diagonale.

Et Doms de lever les yeux au ciel.  

3. Parfois, les stagiaires n’arrivent pas à l’heure. « Tu es en retard. – C’est pas possible. Il est 9h sur ma montre. – Oui mais pas sur la mienne. – Peut-être. Mais je suis à l’heure de Télématin ».

La réponse est sans appel. 

 4. Les stagiaires sont à la merci de Doms. Parfois il se pose devant elles et les fixent sans raison. Parfois il leur interdit même de s’assoir. La stagiaire brave l’interdit pensant que c’est une blague. Mais non.  « Pourquoi tu t’es assise ? ». La stagiaire doit vite trouver une excuse. Valable bien entendu. « Euuuh… pour fermer le tube de colle ».

Et la stagiaire ferme le tube de colle.

 5. Parfois la stagiaire récidive. Elle arrive à 9h06. « Pourquoi t’es en retard ? – J’ai loupé ma station de tram. Je lisais un livre passionnant ». Mais pour Doms, ce n’est pas une excuse.

Même en bibliothèque.

6. La stagiaire a même droit à des interrogatoires. « Donne-moi les 9 catégories de la classification Dewey ». Elle les donne toutes sauf la 400. « Ce sont les ma-thé-ma-tiques, petite ».

7. Parfois la stagiaire blasphème. « Le catalogage et la réception de commandes, c’est la même chose ». « La salooope ! » disent les yeux du bibliothécaire.  

8. Parfois on ne sait pas quoi donner à la stagiaire. « Bon, tu vas me ranger toute l’histoire contemporaine ». La stagiaire s’exécute. Elle inspecte chaque livre, chaque rayon, chaque étagère à la recherche du livre mal rangé. Elle a un escabeau. Elle monte. Elle descend. Elle remonte. Elle redescend. Un (bel) étudiant la regarde. Il ne comprend pas. Il se replonge dans son livre. Non décidément il n’y arrive pas. C’est alors qu’il lance : « Mais vous faites quoi au juste ? – Je vérifie que tous les livres de la bibliothèque sont à leur place ». L’étudiant fait la moue. Il reprend son livre. Et quelques minutes plus tard : « Mais vous allez ranger toute la bibliothèque ? – Ah mais non ! juste ce coin- ci ! ».

La stagiaire a fini. Elle va voir Doms. « Très bien. Tu vas ranger l’histoire moderne maintenant ». Puréééé, ces historiens ils ont divisé l’histoire en combien de périodes ? j’en peux plus…

Mais la stagiaire garde ce genre de pensées pour elle. Elle s’exécute.

9. Les stagiaires ont eu droit à une histoire aujourd’hui. « Oui, on a eu une stagiaire galloise pendant 2 mois. Puis un jour elle est repartie brusquement dans son pays. On a jamais su pourquoi. Et elle est jamais revenue ». 

FIN

La stagiaire de la bilbothèque d’histoire (1) par Anouka Bertolucci

AVERTISSEMENT : Quand vous allez lire ces lignes, vous allez pensez que je suis une stagiaire opprimée. Mais, malgré les apparences, mon stage se passe mieux que je ne le pensais et l’équipe est plutôt sympa avec moi. Donc, ne vous inquiétez pas, tout va bien !  

Premier jour, arrivée dans les locaux. Premier contact avec mon maître de stage : « Vous êtes en retard ». En effet, il est 9h02.

Présentation : il s’appelle D. mais nous l’appellerons « Doms ».

Première matinée : il ordonne à une collègue d’aller déranger une vingtaine de livres de la bibliothèque pour que la stagiaire aille les re-ranger. Bien : ça m’occupera une matinée. 

Le lendemain, très fière, je me présente à son bureau. Il est à 8h58. Rangement « farniente ». Je prends mon temps. Je baille aux corneilles, je dois utiliser un escabeau sur lequel je m’avachis littéralement tout en rangeant tran-quil-lou les étagères. Lorsque j’ai terminé, je baille une bonne fois pour toutes à pleine bouche et reprends mon expression de stagiaire consciencieuse. Puis, débarquant dans le bureau, je découvre une télé avec vues sur les différentes sections de la bibliothèque, juste à côté du bureau de « Doms »…

L’après-midi, encore quelques livres à ranger. Je me pavane devant les étudiants dont certains très beaux (j’ai mon petit chemisier à fleurs rouges, je me sens belle et pleine de charmes). Pause de 16h. Direction le couloir :  je jette machinalement un coup d’œil à ma braguette.  Et là c’est le drame.

 Hier, Doms me confie une mission de  la plus haute importance (« Tu vas voir, on ne fait pas que du rangement ici »). Couvrir des revues.  Dans ma tête : « oh non pas ça, j’y arrive jamais ! .

Tant pis, je m’arme de tout mon courage et commence. 1ère revue très réussie. Abasourdie par mon exploit,  je ne comprends pas.  J’ai même droit aux félicitations de « Doms ». Yeaaaah, belle gooosse ! je vais donc m’atteler à la 2ème ! Hop, je me coupe avec du scotch (je savais pas que c’était possible) et je déchire la couverture. J’ai trop honte. Je n’ose l’avouer à Doms qui, 15 minutes auparavant,  m’a parlé du prix du plastique… 

 Le lendemain, entrevue avec A. alias « Bruce Willis » (il a les mêmes intonations de voix que sa voix française). Interrogatoire sur Rameau, CADIST, la signification de M.A.R.C., j’ai tout oublié. Puis « Bon maintenant on va faire du catalogage. Vous avez des cours de catalogage à l’I.U.T. ? – Non. – Ah bon ???! vous n’avez pas de cours de catalogage !!! mais c’est essentiel dans le métier de bibliothécaire !  (Soudain j’ai un flash. Mme Hubert.) « Aaah mais siiiii ! Ouuiii, on en a, excusez-moi, j’avais oublié ».

 Doms me harcèle tous les jours : « Alors tu n’as pas de questions ? » (et ce 15 fois par jour).  J’essaie désespérément d’en trouver et lorsque, victoire, j’en ai une, je lui lance dans un élan de soulagement : « VOUS ETES OUVERTS COMBIEN D’HEURES PAR SEMAINE  ?!!!!!!!! (vous remarquerez que ma question comporte plus de points d’exclamation que de d’interrogation). Et lui de rétorquer, levant les yeux au ciel :  – Mais c’est pas une question ça !!! je veux des V-R-A-I-E-S questions !!!! ».

 (C’est quoi une vraie question ?).

 Suite au prochain épisode.