La collection Continents noirs

17h au TNBA, samedi 10 avril. Marie N’Diaye et Véronique Ovaldé viennent de quitter la salle Jean Vauthier. On attend à présent de faire connaissance avec la collection « Continents Noirs », fondée il y a dix ans par Jean Noël Schifano, chez Gallimard. Spécialisée en littérature africaine, celle-ci présente une forte identité visuelle : sur toutes les couvertures, un fond jaune clair s’orne d’un fragment de latérite sur lequel se détache le nom de l’auteur et le titre. Mais ces fragments ne se ressemblent jamais ; car, comme le dit Jean-Noël Schifano, si « Continents Noirs » est au pluriel, c’est parce que chaque écrivain est un continent.
La ligne éditoriale ne manque pas non plus de personnalité : on ne peut pas être artiste écrivain si on ne vit pas la malédiction identitaire, soutient Jean-Noël Schifano ; sublimée par l’art, la malédiction se change alors en bénédiction. Ces artistes, dont quatre sont présents, semblent en général confirmer ce point de vue, tout en affirmant chacun un univers différent.
Koffi Kwahulé, qui était dramaturge avant de se consacrer au roman, nous offre avec M. Ki un texte très drôle et fait pour être lu à voix haute, comme le prouve la réaction de la salle lors de la lecture d’un passage.
Fabienne Kanor, qui, elle, est aussi réalisatrice de cinéma, aime que ses textes s’incarnent, que ses mots fassent sens mais aussi chair. Sa brillante lecture d’un extrait de son œuvre laisse entrevoir la thématique qui l’habite : le phénomène de l’aliénation culturelle.
Théo Ananissoh est un auteur emblématique du polar togolais. Son écriture limpide – comme la qualifie Jean-Noël Schifano – et son choix d’un roman hybride, à mi-chemin du classique et du policier, sont le biais par lequel il traite de questions universelles, telles que les arcanes qui régissent le monde du pouvoir.
Scholastique Mukasonga, ayant échappé au génocide rwandais, s’érige en gardienne de la mémoire de toute sa famille disparue. Son œuvre, poignante, est hantée par la faim, la faim de tout, aussi bien physique que spirituelle.
La plongée dans ces quatre univers est fascinante et – si l’on excepte un échange de propos un peu vifs entre un membre du public et Jean-Noël Schifano à la fin de la séance – l’alchimie avec la salle semble se créer spontanément.

Pour en savoir plus, consulter la rubrique Continents Noirs sur le site des éditions Gallimard :
http://www.gallimard.fr/catalog/html/actu/index/index_continentsnoirs.html

Bibliographies

Koffi Kwahulé
Babyface, 2006
M. Ki : rhapsodie parisienne à sourire pour caresser le temps, 2010

Fabienne Kanor

D’eaux douces, 2004
Humus, 2006
Les chiens ne font pas des chats, 2008
Anticorps, 2010

Théo Ananissoh
Lisahohé, 2005
Un reptile par habitant, 2007
Ténèbres à midi, 2010

Scholastique Mukasonga

Inyenzi ou Les Cafards, 2006
La Femme aux pieds nus, 2008
L’Iguifou : nouvelles rwandaises, 2008

Émilie, AS Bib

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